Suite à la pose de la première pierre du mémorial Thomas Sankara le 15 octobre 2018, le magazine Cité Elégance a eu une interview avec le secrétaire permanent du mémorial, M. Lianhoue Imhotep Bayala à Ouagadougou. Lors de cette interview, il a été question du processus d’avancement du mémorial afin que le magazine puisse suivre son l’évolution.
Quel rôle jouez-vous dans la réalisation du mémorial Thomas Sankara
Je suis Serges Bayala à l’état civil et rebaptisé pour les convictions panafricaines que nous portons Bayala Lianhoue Imhotep. Je suis le secrétaire permanent du mémorial Thomas Sankara.
Comment le projet du mémorial Thomas Sankara a vu le jour ?
Le projet est né à la faveur de l’insurrection populaire des 30 et 31 octobre 2014, tous les héritiers de Sankara étaient persuadés qu’ils ne serviraient à rien de penser à une réhabilitation politique, morale et idéologique de Sankara tant que les acteurs directs qui ont œuvré pour sa disparition sont encore au pouvoir. Cet environnement politique était fortement défavorable à la naissance d’une telle idée mais à la faveur de l’insurrection il y a eu quelque chose de transcendantale, d’inimaginable qui a porté l’énergie révolutionnaire et insurrectionnelle du peuple burkinabè. Ce projet n’est pas exclusivement né de la tête des porteurs de projet comme Bayala, Smokey ou Samsk. C’est un ensemble de citoyen qui parle de Sankara.
Le projet est à quel niveau ?
Cela fait deux ans que nous avons jeté cette initiative dans la réalité d’une future réalisation (le 02 octobre 2016). Aujourd’hui, nous sommes dans le processus du concours architectural qui doit nous présenter une maquette pour pouvoir passer à la phase pratique déjà d’un point de vue visuel à quoi va ressembler le mémorial ? Nous avons connu un certain nombre de difficultés en la matière. Nous avons lancé deux concours qui se sont malheureusement révélés infructueux. Aujourd’hui, nous sommes dans une phase d’une constitution de pool d’architectes qui vont travailler de plein concert, associer leurs compétences techniques afin de nous sortir l’œuvre consensuelle. La première maquette qui nous a été présentée en février 2017 a été invalidée par le comité international parce qu’elle ne remplissait pas l’un des critères fondamentaux qui est l’originalité et le caractère inédit du projet.
Nous avons dit aux quatre architectes qui avaient pris part au concours de se mettre ensemble afin de nous sortir une œuvre unique sauf que l’architecte qui était pressenti pour être retenu a trouvé que c’était injuste et il a posé plainte. Mais nous continuons avec les trois autres architectes qui sont en train de travailler en ce moment pour nous présenter une maquette et cette maquette c’est vraiment l’alpha et l’oméga du projet. Nous avons mis en standby les souscriptions et vous aurez constaté par vous-même que nous ne communiquons pas la dessus et cela est expressément fait parce que l’élément qui doit apporter ces souscriptions c’est la maquette qui sera assortie du travail des architectes. Donc nous sommes à ce niveau. Il faut préciser que nous avons procédé à la pose de la première pierre du mémorial. Pour nous c’est un principe de marquer déjà le territoire et dire aux gens que le processus de démystification, de peur du Conseil de l’entente est en train d’être inversé.
Qui sont les personnalités qui accompagnent le projet de construction du mémorial Thomas Sankara pour que cela se passe dans la transparence ?
Le mémorial a eu le bénéfice d’associer des sommités du monde africain et même au-delà de l’Afrique autour du personnage de Thomas Sankara. Vous savez que c’est un personnage très rassembleur qui a su convaincre à son époque beaucoup de personnes. A ce titre, nous pouvons citer un monsieur comme l’ancien chef d’Etat de la république du Ghana, John Jerry Rawlings qui est le président d’honneur du mémorial Thomas Sankara. C’est aussi un comité qui a eu l’accompagnement de grands acteurs du monde du cinéma Hailé Guerima. Ce monde de la diaspora toujours dans la ligné des cinéastes, on a Bakupa-Kanyinda Balufu qui est le 1er cinéaste à faire un film sur Sankara à l’époque où personne n’osait le faire.
On a aussi des pays amis comme le Cuba, le Venezuela, l’Angola, l’Afrique du Sud avec le personnage politique de Thabo Mbéki qui soutient aussi l’initiative, le président actuel du Rwanda Paul Kagamé qui est le nouveau Sankara du continent et qui le cache à personne le fait que son pays s’inspire largement des politiques publiques de l’ère révolutionnaire pour bâtir le Rwanda que nous admirons tous. Nous avons aussi la présence des différents héritiers de Thomas Sankara à travers le monde: (le Mali, la Guinée, la Cote d’Ivoire, on avait une quinzaine de pays, tous les pays de la sous -région et même de l’Afrique Centrale, les pays européens, etc.).
Au plan local, nous avons pu associer six ministères au plan technique qui sont les répondants de l’Etat, c’est le ministère de la culture qui est le porteur du projet qui l’a défendu en conseil des ministres, le ministère de la communication, le ministère de l’habitat et de l’urbanisme, le ministère des affaires étrangères, le ministère de la justice pour des questions judiciaires qui entrent en ligne de compte de nos espérances à travers ce projet mais surtout le chef de l’Etat le président Rock Marc Christian Kabore qui était présent lors de la campagne du lancement.
On aurait appris que la famille du capitaine Thomas Sankara n’était pas d’accord sur le choix du lieu de construction du mémorial mais où en êtes-vous avec ce problème ? Comment vous vous êtes pris pour la convaincre ?
L’une des difficultés que nous rencontrons aujourd’hui c’est comment trouver le moyen d’allier la famille qui est un acteur essentiel de ce projet. Dans ce registre, nous avons prévu suite à la sortie de Mariam Sankara de réchauffer cette question d’alliance avec la famille parce que bien avant cela nous avons entamé une série de démarches pour rassurer la famille. Nous devons impérativement associer la famille dans ce projet pour avoir sa bénédiction quel que soit le prix que cela va nous coûter parce que c’est normal et nous somme en Afrique et nous ne pouvons pas faire abstraction de cela. Nous sommes à cette étape et nous ne désespérons pas. Le Comité international travaille pour pouvoir revenir à de très bons sentiments avec la famille.
Propos recueillis par Assata Sinaré et Ismael Kiekieta